Par où commencer ? Quels mots employer ? Comment exprimer ce que j’ai éprouvé ? J’avoue que je ne sors pas indemne de cette représentation.
Je pense à ceux.celles qui disent avoir été changé.es par un voyage. Eh bien, avec la pièce que proposaient Frédéri Vernier et Sébastien Davis-VanGelder pour l’ouverture du festival Un chapiteau en hiver, je crois que j’ai fait le tour de l’univers.
Des vagues d’émotions, il y en a eu. Et ce, dès les premières minutes. Alors que l’un des artistes (également apnéiste) s’immerge dans l’aquarium qui trône au centre du chapiteau, je retiens mon souffle. Pendant cinq minutes, cet instant suspendu, quasi méditatif, nous plonge, nous public, dans une forme d’écoute particulière. Tout le monde s’est tu. Et lorsqu’il remonte à la surface, il est temps de reprendre ses esprits, de se noyer dans la beauté de ce spectacle.
Le tableau qui suit est une poésie du ralenti. Le ballet sous-marin qu’offrent les artistes effectuant contrepoids et balancés est sublime. Le duo d’une rare sensibilité.
Rapidement, le rire vient. Car certaines scènes aquatiques sont finement conçues. Qui avait pensé à respirer « sous » l’eau, la tête dans une caisse en plastique simplement retournée où un peu d’air crée l’espace nécessaire pour bavasser ? En vase clos, l’oxygène venant à manquer, l’acrobate devient clown et balance des tirades hilarantes. Comme ceux.celles autour de moi, je ris à gorge déployée. Et cela va continuer avec les images qui nous sont offertes ensuite. Je pense notamment à la cavalcade hallucinée à dos de sirène, instant épique de ce pas de deux subaquatique.
Mais il aurait été trop facile de nous laisser sur cette image d’un monde fantasmagorique, habité par de joyeuses créatures. Nos océans sont trop précieux pour tendre à tant de naïveté. Trop menacés pour tant de facilité. La scène finale, je la vis comme un coup de harpon en pleine poitrine. Baigné de plastique, l’aquarium s’est mué en un lieu de duels. Qui gagnera sa place pour aller respirer à la surface ? Qui sera le plus fort pour survivre à ce cauchemar ? Tant de clins d’œil imbibés à l’urgence de notre monde saboté.
En sortant de là, nous sommes allés retrouver le réel, inhaler l’oxygène pollué et prendre des bouffées généreuses sur nos cigarettes viciées. Quoi qu’il arrive, mon cœur a chaviré. J’ai aimé chacune des minutes de ce conte des grandes profondeurs (ou devrais-je dire : d’une grande profondeur).
_ _ _
Out of the blue – Frédéri Vernier et Sébastien Davis-VanGelder
Performance vue le 26 janvier 2024 à la Cité Cirque dans le cadre du Festival Un chapiteau en hiver
Site internet de Out of the blue
Compte instagram Out of the blue
_ _ _
Photo de Une © Gaëtan Fritsch
Création graphique © Happe:n