Événement unique en son genre, Trente Trente reprend très bientôt pour une 22ème édition qui irriguera de spectacles et performances une dizaine de lieux culturels du territoire. Rendez-vous du 15 janvier au 1er février 2025 à Bordeaux, Le Bouscat, Mérignac et Gradignan pour se faire secouer gracieusement.
Le comédien, metteur en scène, directeur artistique… (and more !) Yacine Sif El Islam sera les 16 et 17 janvier au Glob Théâtre de Bordeaux pour y présenter son diptyque ABUS (dont les volets s’intitulent sola gratia et agnus dei). Cette programmation sur l’édition 2025 du festival marquera la création d’agnus dei et des occasions exceptionnelles d’apprécier les deux chapitres d’ABUS joués successivement.
- • • Raconte-moi ton parcours artistique • • •
“J’ai commencé le théâtre quand j’étais tout jeune. Dans le village de Haute-Saône que j’habitais avec ma famille, nous avions la chance d’avoir une personne investie qui proposait un atelier théâtre hebdomadaire. J’y allais chaque semaine avec beaucoup de plaisir. Ces personnes s’impliquaient énormément, on sentait qu’elles donnaient beaucoup pour réunir les enfants du territoire autour d’une pratique artistique. Cela m’a donné le goût de la comédie et une fois au collège, j’ai choisi d’intégrer le club de théâtre. Au lycée, j’ai choisi un établissement qui proposait une option théâtre car j’avais envie de passer plus de temps à travailler des textes, jouer la comédie, monter sur scène…
Et puis j’ai eu envie d’en faire mon métier. Donc après le bac, j’ai fait un diplôme d’études universitaires scientifiques et techniques (DEUST) théâtre, deux ans pendant lesquels j’ai reçu des enseignements théoriques, mais surtout pendant lesquels j’ai pu pratiquer le théâtre. Suite à cela, j’ai intégré l’éstba (école supérieure de théâtre de Bordeaux Aquitaine), formation qui durait deux ans également. En sortant de cette formation, j’ai créé le groupe Apache avec cinq autres ancien.ne.s de l’école. J’ai alors signé ma première mise en scène avec ce collectif, il s’agissait du Misanthrope de Molière, que nous amenions dans des lieux non dédiés à la culture comme des églises, des fermes, un chantier naval… C’était le début d’une belle aventure parce qu’après cela, six autres comédiens ont intégré le groupe et nous avons monté deux autres pièces.
Le collectif a fini par se séparer et j’ai continué à travailler de mon côté, à développer ma propre poétique. Mon travail s’axe sur l’observation de la société, questionne l’humain et la violence. Mon premier projet en solo était sola gratia, pièce que j’ai sortie en 2022 et que je présenterai cette année sur l’édition 2025 du festival Trente Trente en plus d’agnus dei.
Il y a un peu plus d’un an, j’ai également pris la direction artistique des Avant-Postes (ancien Théâtre de La Lucarne), un lieu artistique en plein cœur du quartier Saint-Michel que nous envisageons avec Benjamin Yousfi (directeur du lieu) comme un lieu dans son temps, ouvert aux artistes et aux publics. Un espace que nous avons également choisi de dédier à l’émergence et aux nouvelles écritures.”
- • • Qu’est-ce qui t’amène (aujourd’hui) au Trente Trente Festival ? • • •
“C’est la sortie d’agnus dei, le deuxième volet du diptyque que j’avais entamé avec sola gratia. Jean-Luc Terrade (le directeur artistique du festival) m’a proposé de jouer la première de cette nouvelle création sur l’édition 2025 de l’événement et je suis heureux de pouvoir la dévoiler pendant ce temps fort artistique singulier, ce festival des formes non conformes.
Mon travail n’est pas conventionnel et le créer sur Trente Trente me met en confiance et m’apporte de la sérénité. sola gratia et agnus dei sont des pièces hybrides à la croisée du théâtre, de la chorégraphie et de l’installation. C’est tout à fait dans ‘l’esprit Trente Trente’ : des formes dégenrées et dérangées.”
- • • Quelles thématiques abordent les spectacles que tu y présentes ? • • •
“De façon globale, les deux spectacles abordent les violences politiques et intimes. J’ai conçu ces pièces en me basant sur le principe du négatif photographique. Dans sola gratia, je dis le mal, crie l’injustice, partage les peines pour exorciser la souffrance sur le plateau. Dans agnus dei, je prends chair : je deviens l’agneau, cette figure omniprésente dans notre société et qui représente tant de symboles. Je tente naïvement de convoquer la violence du monde pour l’enfermer dans un théâtre.
Plus précisément, le deuxième volet d’ABUS (qui est le nom du diptyque) est une traversée des grands traumatismes qui font l’Histoire. J’y parle par exemple d’Auschwitz, de Gaza… S’y mêlent des récits tirés d’expériences personnelles, de faits divers, de la mythologie et des religions.
Si sola gratia était une ‘ode pour les survivants’, agnus dei est plutôt un ‘chant pour les morts’. Il y a quelque chose de l’ordre du rituel qui pourrait ressembler à une cérémonie de la violence qui fabrique notre monde. Je suis vraiment heureux de pouvoir jouer les deux pièces l’une à la suite de l’autre, je pense que ça peut vraiment provoquer quelque chose chez le.la spectaeur.rice.
- • • Pour quelles raisons il ne faut manquer pour rien au monde cette nouvelle édition du festival Trente Trente ? • • •
“Pour rien au monde ! Trente Trente, c’est un festival qui ne nous endort pas. Grâce à cet événement, on a la possibilité de découvrir des artistes tout à fait singulier.e.s et personnellement, je trouve cela vital. Les formats courts qui y sont programmés permettent aussi de voir beaucoup de choses et ce foisonnement artistique est une vraie nourriture pour l’esprit.
Ce qui est super important avec ce type d’événement est que l’on développe notre imaginaire, on ouvre notre esprit. A mon avis, on peut vivre sans théâtre mais je crois qu’on vit vraiment moins bien sans lui.”
- • • L’après Trente Trente, ce sera quoi pour toi ? • • •
“Je vais entrer en processus de création pour une prochaine pièce : Portrait de l’artiste en serial killer, un projet qui verra le jour en 2026 à Bordeaux.
Et puis, je vais aussi continuer ma mission aux Avant-Postes : accueillir les artistes, les publics, les faire se rencontrer. J’aimerais aussi y mettre en place un groupe pour faire des expérimentations de mise en scène. Le but est de profiter de ce lieu, non pas pour créer des formes définitives, mais pour tenter de nouvelles choses.
Et puis, il y aura également des dates de tournée. Sola gratia est notamment programmée à Bruxelles en mars dans le cadre des Mots à Défendre. Ça va être une belle expérience !”
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ABUS I et II (sola gratia et agnus dei) – Yacine Sif El Islam
les 16 et 17 Janvier au Glob Théâtre
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Yacine Sif El Islam
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Le Festival Trente Trente – Les Rencontres
du 15 Janvier au 1er Février 2025
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Programmation complète de Trente Trente
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Photo de Une © Giulio Boato
Création graphique © Happe:n